- Le paysage, imagination du réel ou artificialité ?
Lignes courbes et découpes.
L’artificialité du paysage est la première manifestation de ce qui deviendra l’anthropocène. Cependant, contrairement à l’artificialité du monde industriel qui se fait contre ou sans la nature, l’artificialité du paysage est loin d’être néfaste aux autres manifestations de la vie sur terre. Bien au contraire, comme le montre l’exemple des étangs de la Sologne, créés par la volonté de Napoléon III, ou, plus anciennement, la domestication de l’eau par les abbayes cisterciennes. Dans les deux cas, ils ont non seulement permis un développement des poisons d’eau douce mais, ils ont aussi éradiqués les fièvres des marais. Voir aussi les liens entre la nature et les tribus de l’Amazone.
Paysage et artificialité
L’artificialité fondamentale du paysage-image réside là : il est construit par l’œil humain et les lois de la perspective optique dans un face à face Homme-Nature. L’évolution de la représentation du paysage dans l’histoire de la peinture occidentale est là pour affirmer le paysage comme une causa mentale. Causa mentale car les représentations du paysage varient selon les cultures. Ainsi, les chinois tentent d’appréhender les fluctuations, les mouvements, voire les transformations du paysage. Quant aux représentations des aborigènes, par leur évocation du chemin pour retrouver l’eau, les vers blancs, … elles parlent du paysage du point de vue de la survie. Ce paysage là n’est donc pas construit sur la ressemblance, tel qu’elle est pensée en Occident, et c’est pourquoi il nous est difficile de considérer les représentations aborigènes comme des paysages.
Les paysages occidentaux sont donc des paysages considérés comme une perception visuelle de notre environnement, à perte de vue. Que signifie à perte de vue dans la montagne ?
Il est vrai que cette perte de vue est toujours possible lorsque l’on se place sur les sommets. Qu’en est-il lorsque l’on est installé dans la vallée ? Dans la mesure où la perspective est l’invention du point de vue d’un être humain à l’instant T et à un point P ; une retranscription picturale de l’Hic et Nunc, de l’ici et maintenant. Que signifie voir au loin dans ces conditions ?
Paysage et artialisation
L’artialisation du paysage est le pendant de l’artificialité, elle ne peut exister sans cette artificialité même si la réciproque est fausse. En effet, le paysage quand il n’est pas seulement préhension visuelle qui le chosifie est aussi en harmonie avec la nature comme nous le raconte les abbayes cisterciennes et leur programme de maîtrise de l’eau.
Comment le drone, un des instruments de l’ubiquité, va-t-il transformer le point de vue de la perspective ? Marque-t-il un retour du point de vue divin -tel que le Moyen-âge l’envisageait- dans le pictural ?
Quelles traces-sillages existe-t-il encore aujourd’hui de l’ancien paysage dans le paysage contemporain ?
© Hervé Bernard 2019