IV partie 2" /> IV partie 2" />

Regard sur l’image

Accueil > Français > Image et société > Faire des dieux > Faire des Dieux ou inventer au plus de près de la schize — IV partie 2

- Faire des Dieux ou inventer au plus de près de la schize — IV partie 2 Francis Scott Fitzgerald

,  par Hervé BERNARD dit RVB, Jean-Louis Poitevin

Première partie du séminaire IV

PARTIE II : Francis Scott Fitzgerald

A Prolégomènes à une lecture de la nouvelle de Francis Scott Fitzgerald The crack-up ou La fêlure ou encore L’effondrement.

Passer de Bellmer à Francis Scott Fitzgerald (FSF) est tout à fait possible si l’on prend appui sur la table des matières des deux livres que nous avons en ligne de mire.

Petite anatomie de l’image est composée de trois parties ayant pour titres :
 Les images du moi
 L’anatomie de l’amour
 Le monde extérieur

La nouvelle de FSF est aussi composée de trois parties ayant pour titres :
 Sans titre sinon celui général de crack up soit fêlure, effondrement ou craquer
 Recoller (les morceaux)
 Manipuler (avec précaution)

On notera une erreur, une inversion des deux derniers titres dans la version folio (2002) (trad. D. Aury).

Dans les deux cas, on suit une sorte de chemin parallèle. C’est sans doute un hasard… encore que…

Avec Bellmer on part à la recherche de la manière dont fonctionne le corps, entité à partir de laquelle et dans laquelle et pour la vie de laquelle se déploie des mécanismes des jeux de forces divers et surtout tirant dans des directions opposées sinon contradictoires. Tout ce qui pourrait constituer une forme d’unité du moi se révèle emporté par la puissance d’un dédoublement tel qu’il apparaît finalement comme la donnée à partir de laquelle il faudra poursuivre le travail. (p. 23)

Puis dans la deuxième partie, il s’intéresse à ce qui se produit dans ce corps et pour ce corps dans la mesure où il répond à la force maximale qui sourd de lui et le motive à aller vers le dehors, le désir. (Puisque le germe du désir est avant l’être… p. 29) Et ce qui apparaît c’est que le corps, ses parties, ne valent en quelque sorte que si elles peuvent être appréhendées comme pouvant ne pas être égales, ou identiques à elles-mêmes, mais mêlées et/ou interchangeables en particulier entre ce qui passe pour représenter le masculin et le féminin. p. 39 et p. 39-40) Le dehors et le dedans ne semblent pas être des termes permettant de rendre compte de ce qui a lieu réellement lorsqu’on s’intéresse à ce qui se trame dans le corps du point de vue de l’image.

La troisième partie intitulée Le monde extérieur est censée valoir pour la réalité, mais encore faudrait-il que l’entité qui perçoit ce monde extérieur ne soit pas elle-même en proie à des états, à glissements, à des fusions, à des phénomènes qui finalement interdisent de pouvoir fixer une image définitive de ce monde extérieur. La perception n’est pas rapportable à une conscience stable puisque ce qui nous arrive ce sont pour Bellmer des perceptions-rêves.(p. 65-66) Plus encore comme nous l’avons déjà vu la dernière page du livre annonce et énonce que l’individuel et le non individuel sont interchangeables. (p. 78)

On va voir de grands parallèles avec ce qui est en jeu chez FSF alors même qu’il ne semble pas qu’il y ait quoique ce soit de proche entre les deux textes.

Car ce qui est en jeu c’est pourtant la même chose : la question de la consistance du « moi », ou de ce que veut dire être un homme, pas un homme abstrait mais un homme prit dans le tissu de la vie.

La question est « esthétisée » chez Bellmer qui plonge dans les arcanes de la fabrication du moi. La question est dramatisée chez FSF qui dévoile comment fonctionne même s’il le fait après-coup la psyché humaine, c’est-à-dire un « moi » en action, fonctionnement qui n’est « racontable » (moteur interne qui n’est démontable) que lorsque la panne a eu lieu.

1. Dans la première partie :
Craquer, elle-même divisée en deux, il décrit comment ça marche (p. 3-4/p.37/p. 476) puis comment se manifeste la panne, avec le désir d’être seul, c’est-à-dire de se retourner sur ce qui est censé être-là en soi, être soi, le noyau de la vie le moi le je le sujet l’homme et s’apercevoir qu’il n’y a pas tout à fait rien mais un faisceau d’éléments qui ne tiennent plus ensemble sinon par miracle comme cette assiette fêlée qu’il faut manier avec précaution.

On découvre qu’il y a bien un « secret » qui n’est pas secret, à savoir qu’il existe quelque chose qui n’est ni moi, ni je, ni self, ni sujet mais qui détermine tout et qui n’est pas communicable à savoir une force la vitalité, ce qui fait que le moteur tourne…

la traduction de G de la citation de Matthieu 5,13 qui clôt cette partie est la meilleure : « Vous êtes le sel de la terre. Mais si le sel vient à s’affadir, avec quoi le salera-t-on ? »

2. Recoller, le titre de la seconde partie donne le ton.
On plonge dans l’histoire du je et on découvre la présence non pas de failles ni de fêlures mais d’écarts de distances, de décalages, bref, de non homogénéité dans ce qui passe pour devoir l’être, homogène, dans le fonctionnement supposé normal d’une existence humaine.

Deux écarts se produisent dans l’histoire du sujet de l’individu qui donnent lieu à des reprises en main positives et à faire du sujet ce qu’il est devenu : écrivain et riche. (p. 9/p. 61/p. 487)

Mais, et là cela a lieu dans le grand dehors du monde, de la réalité qui elle aussi a sa vie propre ses rythmes propres et qui donc suit son chemin, quelque chose se produit qui affecte les deux pôles qui ont permis à ce je, moi, sujet, de se former et d’exister, l’écriture d’une part et les différents mécanismes qui dans la conscience et la conscience de soi permettent à ce je, moi, sujet, de fonctionner et de tenir.

Ces deux points sont essentiels. Le premier c’est la perte de valeur ou de fonction de l’écriture romanesque emportée dans le mouvement de la société spectaculaire marchande portée par le cinéma. (p. 10/p.67/p. 489) Mais sur le fond d’une dévaluation de toutes les valeurs (idem).

Le second est la disparition de la consistance du Je, moi, sujet, qui se trouve non plus porté par le fait de fonctionner mais par le fait de commencer à se regarder fonctionner et ainsi de se percevoir et de s’apercevoir que ce regard sur soi est à la fois le signe d’un dysfonctionnement et ce qui empêche que la mécanique puisse continuer de fonctionner.(p. 12/p. 71-72/p. 492)

L’individu fait face à une force extérieure imbattable. (p. 11/p. 69/p. 490)

Le décor est planté. Si le sujet d’effondre, se fêle, se défait, ce n’est pas parce qu’il serait faible ou par une quelconque perversion intérieure, mais parce qu’il a affaire d’une part à une force extérieure imbattable donc, le mouvement de la société même qui le décale de ce sur quoi comme petit esquif individuel il s’était construit (car on nait toujours à une époque donnée et on se construit à partir ce qui est accessible à cette époque même si on va aussi puiser dans d’autres sources, on le verra) et parce qu’il se découvre comme étant mais n’étant plus que cet esquif.

Mais la plus terrible des révélations c’est que le sujet moi je en fait s’il est bien un esquif qui a su surmonter tout un tas de tempêtes est malgré tout si on le regarde comme tel, VIDE, il n’y a personne à la barre, pas de je, pas de sujet, pas de moi, au mieux un pantin, une marionnette… !

Ou plus exactement ce je, ce sujet, ce moi se révèle être ce qu’il est un pur composite, composé patchwork mélange associations d’éléments divers sans liens entre eux, etc. Bref, une mécanique bancale que ne tient aucune force autre que la vitalité déterminant la possibilité pour une intelligence de premier ordre de faire fonctionner la marionnette (la poupée, etc.) qui ne se percevait pas quand elle croyait fonctionner « seule » comme une marionnette.

3. Dans la troisième partie, Manipuler
On en vient à l’examen détaillé de ce qui reste à faire une fois la découverte faite (et elle est en quelque sorte irréversible) de la vacuité du je, moi, sujet.

C’est qu’il y a une force plus essentielle encore que toutes les forces et que la vitalité même qui est si l’on veut l’instinct de survie la vie même en tant que subsistance dirait Stiegler et non pas existence et donc encore moins singulière et créative, qui pousse et porte l’individu vivant à durer encore et encore, mais cette force appréhendée pour ce qu’elle est, met tout le reste en lumière ou sous une autre lumière si crue que ce qu’il y a à voir apparaît sous la forme du, ou porté par, ou caractérisé par, le mensonge.

La force vitale évanouie, c’est le je, le moi, le sujet qui se trouve contraint de prendre la relève et il s’aperçoit qu’il ne peut rien faire d’autre que d’être un ventriloque de lui-même étant entendu que ce lui-même était en fait non pas l’autre ou un autre mais lui-même en tant qu’il n’était pas conscient.

Oui on peut et on doit aller jusque là, grossir le trait et faire un parallèle avec Jaynes.

Bien sûr il savait ce qu’il faisait, on l’a vu il a voulu écrire et être riche et il y est parvenu, mais il ne sait pas comment cela s’est fait sinon en puisant dans ses forces sans compter et en dépensant en dépensant et en créant en créant et en dépensant, bref en vivant. Mais sous un certain angle, celui qu’il est sait et ne sait pas ce qu’il est, il sait qui il est mais en fait il doit finalement ignorer, occulter, ne pas savoir réellement ce qu’il fait, au sens de la conscience comme force en acte capable de décider et choisir (qui est rappelons-le, le rôle des dieux chez Homère pour Jaynes). Il fait sans décider, il fait dans le mouvement dans le flux et à peine la machine le moteur s’arrête-t-il que tout change, tout apparaît sous son vrai jour comme une salle après la fête. Tout est défait, usé, cassé.

Et là la conscience, l’autre face de la conscience, celle qui sait qu’elle est en relation avec la volonté mais ne parvient pas à décider à se décider à faire que le sujet qu’elle est ou qui croit être cette conscience, tente de prendre la décision, de prendre le relais mais elle a été dissociée de la force vitale l’incommunicable celle qu’on a ou qu’on n’a pas et elle ne parvient donc à rien d’autre qu’à sauver les apparences, comme on dit.

FSF tel un héros grec vu par Jaynes a agit, porté par la vitalité et emporté au-delà de lui-même, au-delà qui était finalement « le vrai » lui-même !, par le souffle de la création. Une fois arrêté par contre, il tente de renouer avec le dieu en lui, (c’est en tout cas non pas le vocabulaire de FSF mais la situation qui nous permet de dire cela) celui qui lui a permis d’aller jusque là où il est allé sans l’empêcher de s’épuiser à la tâche ( mais les héros grecs meurent aussi, ils le savent) et le dieu se révèle absent pas là vide rien et tout est à faire mais sans le dieu à refaire mais sans la vitalité à reconstruire mais sans la force d’unification qui fait tenir les pièces ensemble. Et cette force qu’on dit être la conscience, la volonté ou autre chose, eh bien cette force n’est pas à la hauteur de la tâche de l’existence ! Et pire encore, elle ne l’a jamais été. La tâche est trop grande et il faut de l’aveuglement pour que ça marche de l’aveuglement sur la chose essentielle qui est en quelque sorte comme pour ceux qui ont le vertige de NE PAS regarder en bas, de NE PAS se demander si ceci ou cela, de NE PAS… mais de faire, d’inventer, de créer.

Oui au cœur de la création il y a ce Ne PAS qui est comme la clé de l’aveuglement positif et qui a pour corollaire on le voit bien en ces temps difficiles un aveuglement négatif qui en plus, et c’est là que c’est « tragique » consiste en la même chose que le positif. Et c’est là que la nouvelle est passionnante pour nous.

Francis Scott Fitzgerald

En quoi consiste l’aveuglement ?
Il n’est en rien agréable !! C’est le moins qu’on puisse dire ! De voir savoir ce que l’on est vraiment, de voir savoir ce qu’est vraiment le je, sujet, moi. Car qu’est-il en fait…. ? Rien !Un truc pas bancal, un truc mensonger, un idéal prétentieux qui n’a pas mais pas du tout les moyens de ses fins et auquel on a cru car il n’était pas comme un dieu extérieur mais comme ce que la société distille et donc instille en chacun, la croyance qu’être quelqu’un c’est « ça », réussir, gagner de l’argent, etc… Le moi, le je, le sujet sont des constructions de l’idéalisme théologico-politique de la croyance en la supériorité de l’homme sur les animaux , la nature, l’univers, etc.

Le moi, c’est juste un « il faut » qu’il faut justement continuer à accomplir. Un être qu’il faut continuer à pousser ou à tirer même si on sait ou surtout si on sait qu’il est faible qu’il n’est pas tout à fait rien mais pas grand-chose…. Et on devient celui qui veut l’aider le sauver tenir encore à quelque chose en tenant à lui ce petit être qui était en nous et qui est nous quand le grand nous (le héros) s’est évanoui comme grand et apparaît comme petit et fêlé inutilisable mais qu’on a encore envie de protéger (subsistance).

Et là on parvient au point central qui nous fait passer de Bellmer et FSF à Stiegler.

Ce que le sujet-moi-je « est » !

Nous avons été élevé dans une croyance, la croyance qu’il y a sujet, moi, je et que de pouvoir dire je est le summum, le sommet de ce à quoi peut parvenir un être humain. Mais nous savons aussi que tout, absolument tout cela, est en fait une construction sociale relayée par la nature (la puissance de vie) et modérée par les faiblesses inhérentes à chaque individu.

Et que cette construction sociale ne veut pas pas absolument pas de singularité, de génie, de personnalité hors norme ou même tout simplement de quelqu’un qui pourrait NE PAS vouloir ce qu’elle veut elle, la société. La société est un organe transindividuel qui fonctionne sur le modèle du vivant connecté à des appareils techniques inventés par elle, c’est-à-dire par les hommes qui la composent, qui veut à travers ses organes maintenir son existence, assurer son homéostasie et se nourrir et vivre tranquillement en continuant à faire exister les rêves qui la fondent. Car ce ne sont que des constructions mentales, verbales, sociales et techniques et c’est cet entrelacement qui reste impensé au sens profond du terme. Et elle ne veut en quelque sorte rien d’autre que subsister… Même si ceux qui l’agissent eux veulent, désirent, cherchent à exister au-delà d’eux-même étant emportés eux aussi par le souffle, sinon de la création du moins de l’inconscience de l’aveuglement qui est co-essentiel à l’idéal du moi qui sous-tend ce fonctionnement individuel et sociétal.

J’en ai quant à moi trouvé la manifestation précise et qui m’a fait voir ce qui m’échappait jusqu’ici quand j’essayais de comprendre ce qu’il en était du sujet, fut-il créateur, il y a quelques années maintenant, dans une phrase qui se trouve dans Tu dois changer ta vie, un livre de Peter Sloterdijk à la fin d’un passage consacré à Sartre : « L’homme n’est pas négativité, il est le point de différence entre des répétitions. » (p. 593) (Ed. Pluriel)

Bien sûr il y avait eu Flusser et Simondon en particulier, mais je butais sur cette question de la formulation de ce qui et du comment se constitue l’individu. Pourtant Simondon en dit beaucoup. Il fallait lever la prégnance freudo lacanienne sur cette question.

Puis plus récemment en lisant Stiegler et en particulier en même temps que je préparais cette séance De la misère symbolique, j’ai à la fois compris ce que je pensais déjà avoir compris mais compris vraiment parce que Stiegler offre de ce jeu une version renouvelée, dynamique et crédible.

Plus exactement si l’on veut, il montre à la fois comment FSF a raison que l’on est ça et que ça et en même temps il montre que la base de cette version dépressive du sujet peut être dépassée, surmontée. En effet, elle se base sur l’idéalisme du moi et tout ce qui le porte et le maintient.

Mais il est possible de PENSER autrement ce que nous sommes ce qui nous fait et ce que nous faisons.

Cela demande un gros travail et Stiegler en a fait sa part, une grande part et il importe donc pour de montrer sur quelques points en quoi et comment on peut penser ce que nous sommes autrement.

La mise en jeu « ça », voilà en fait l’objet du séminaire.

Conclusion
Pour aujourd’hui, ce qui importe c’est de signaler certains points et d’ouvrir la voie à la refondation de la pensée de ce que nous sommes comme être humains et singularités et comme être humains socialisés. Et cela passe et là contrairement à la leçon de FSF par une levée de l’aveuglement sur les prérequis dans lesquels nous sommes pris.

Mais c’est là un travail philosophique de longue haleine et pour lequel Jaynes nous aidera aussi à sa manière. Nous le ferons en renouvelant la lecture de textes grecs et chrétiens dans un premier temps et en parallèle par la relecture aussi de quelques textes plus récents actuels comme des textes de Toni Morrison, Kleist ou Rilke, nous verrons.

Quelques incises de Bernard Stiegler dans De la misère symbolique nous permettrons de mieux nous orienter relativement à cette question du « je » et à quelques autres qui sont liées à ce que nous avons pu développer ce jour.

1. Le Je

Il suffit de lire les débuts de paragraphes de ce chapitre 28 pour prendre la mesure de l’enjeu. Le « je » n’est rien seul, mais cela on s’en doutait, mais surtout, ce qu’il nous fait prendre en considération c’est le passage « un je est essentiellement un processus et non un état... » (p. 83).

2. L’inexistence de l’unité du moi

Dans le § 21 de la seconde partie c’est la fêlure qui est directement abordée.

En lisant les p. 231-232, on peut appréhender la fêlure comme coextensive à la conscience, autant dire à la psyché.

Et avec ce qu’il nomme défaut d’origine, on voit que ce que nous racontait FSF est en fait non pas seulement quelque chose qui arrive à l’écrivain alcoolique mais à tout homme. C’est pour ça qu’il est possible de retourner la schize à tendance dépressive contre elle-même et d’en faire une force de construction d’un autre modèle du « je ».

3. L’articulation de trois systèmes et leur complexification

Un individu, une personne, un « je » une conscience n’existe en rien hors de l’articulation entre les trois systèmes que sont « les organes physiologiques, les organes artificiels et les organisations sociales ». Si on lit le passage on voit que c’est autour de la possibilité même de l’art et de sa fonction dans la société que la question devient brûlante. (p. 329)

On verra aussi par la suite comment Bernard Stiegler multiplie et fait varier ces triades et nous permet ainsi d’accéder à la complexité de ce que nous sommes c’est-à-dire des relations qui nous font et font que nous sommes ce que nous sommes.

Ainsi, la triade rétentions primaires, secondaires et tertiaires, qui anime toute la pensée de Stiegler apparaît-elle comme une autre manière plus riche encore de penser ce que nous avons vu la fois précédente autour des notions de traces, de fantasmes, de mémoire au singulier et au pluriel et surtout de la relation entre sensation, perception et concept ou fantasme selon, c’est-à-dire entre expérience directe, expérience rappelable par le souvenir et expériences induite par auto-production psychique d’éléments actifs et déterminants dans nos existences mais n’ayant que peu ou pas du tout de liens avec des expériences vécues ou des souvenirs disponibles. Ainsi la lecture des p. 353-354 nous propose-t-elle un éclairage plus puissant sur ces questions.

Une autre triade (fonds préindividuels propres au moi et vécu par lui / fonds préindividuels hérités de ses ascendants / fonds communs à tout le vivant désirant (humain)) est encore présentée p. 357 qu’il faut mentionner parmi d’autres mais qui ne peut être développée maintenant bien qu’elle soit en lien aussi avec le texte de FSF.

4. La relation dehors-dedans comme fiction (qui rend malade)

La conception générale du sujet est basée sur une croyance indéracinable en l’existence de deux mondes l’un qui est au dehors ou le dehors et l’autre qui en dedans ou au dedans.

Nous commençons, ici, à appréhender que ces métaphores devenues « vérités » à force d’être reprises et commentées au point d’être instituées comme indépassables, sont à la fois un vecteur d’occultation des véritables mécanismes psychiques et de la relation je-monde mais aussi un obstacle à leur compréhension. Il faut changer de métaphore ! Et souvent, c’est de cela dont il est question dans le champ de la pensée, de la philosophie, de la raison ! Nous ne pensons qu’avec et à partir de mots qui nous incitent ou nous « obligent » comme le dirait Don Jan à M Dimanche.

Ce passage de la p. 359 va nous replonger d’un coup dans le monde de FSF que l’on va entendre résonner et raisonner autrement. Et l’on voit comme s’effacer sous nos yeux ou à nos oreilles le partage pourtant apparemment si indépassable entre dedans et dehors.

Et il sera l’un des enjeux de la suite de ce séminaire.

Arrêtons-nous là et mentionnons seulement les points majeurs, les notions ou les concepts nouveaux ou devant être revus à la hausse ou à la baisse qui vont nous occuper par la suite :
 le lien entre continu et discontinu dans l’organisation du je et de la relation moi/monde comme dans les processus de création ;
 la relation âme/divin ;
 le perdu ou la perte comme élément commun à chacun et à tous ;
 la question du temps ou des temps revue à partir du couple synchronie/diachronie ;
 la question de la décision et de la relation conscience / cerveau avec la décision
etc.

On le voit le programme est vaste.