Comme nombre d’entre nous, depuis longtemps, j’ai remarqué la différence de position entre le cycliste hollandais et le cycliste français. Ici bien entendu, j’évoque le vélo utilitaire, celui utilisé quotidiennement pour se rendre d’un point à un autre et non le vélo de compétition.
En effet, le cycliste hollandais, plutôt que de courber l’échine sur l’effort, pour faire avancer son vélo, se tient dignement et prestement droit, le regard au loin, ce qui, au demeurant, en ville, est essentiel. Ce regard au loin se complète d’un regard proche pour détecter les obstacles comme les nids de poule.
Quoi qu’il arrive, quelque soit l’effort à produire, avec un vélo hollandais, vous conservez votre dignité. En cela, réside sa différence avec le vélo français, pédaler hardiment dans l’adversité de l’effort est impossible sans courber l’échine. À tel point que certains cyclistes français semblent porter un joug. À quoi cela est-il du ?
Nul besoin d’être clerc pour réponde. L’explication réside dans la différence de position du guidon. Ainsi, essayez de pédaler régulièrement et dignement en tenant un parapluie, au-dessus de votre tête sur un vélo français ou encore de téléphoner (je sais, en France, ce n’est pas permis...), c’est quasiment impossible. Sur un vélo hollandais, pour l’avoir vu des dizaines de fois lors de ma résidence amsteldamoise à la Maison Descartes en 2011, je peux vous affirmer que non seulement c’est facile, mais ce n’est pas une source de déséquilibre ou de ralentissement. À quoi tiens cette différence ?
À la conception du dit vélo ! Donc l’un fait suer et l’autre pas. Surgit alors une question : le dessin d’un vélo serait-il le reflet d’une idéologie ?
Ici, celle du protestantisme qui accorde une grande importance à la dignité individuelle à l’encontre de celle du catholicisme qui affirme : « à la sueur de ton front, tu gagneras ton pain » Et par conséquent, même pour te déplacer, il te faudra suer.
Accessoirement, cela expliquerait aussi pourquoi de nombreux utilisateurs de vélo français se promène avec une selle trop basse, ce qui mécaniquement est un facteur de gaspillage d’énergie. Choisiraient-ils entre la dignité et l’efficacité ? À moins qu’ils ne soient rattrapés par un sens de l’équilibre déficient ? L’un n’exclut pas l’autre, bien au contraire. Cependant, il semblerait que les hollandais soient peu atteint par le syndrome de la selle trop basse ? S’agit-il simplement d’une pratique plus large du vélo, les français ayant récemment redécouvert ce véhicule suite à l’engouement pour le Vélib et autre système de location de cet engin...
Ceci nous ramène au propos de Françoise Dolto qui disait que tout est langage. Cet exemple montre, que si tout est langage, tout est symbole et donc tout à du sens. Mais alors que faire de ce sens ?
Épilogue
Faire du vélo, c’est être présent au monde : mettre en marche simultanément, la vision, l’ouïe, le toucher, le sens haptique de l’équilibre...
Être dans le métro est à l’opposé. Le vélo nous met dans une vigilance globale, le métro nous réduit à la vision. On ne veut ni être toucher ni toucher et bien avant l’arrivée du Covid. Quant à sentir n’en parlons même pas, qu’il s’agisse du courant d’air ou de l’odeur des corps, des machines, cela est encore plus incongru. Le métro nous isole. Le vélo nous fait appartenir.