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- Publicité, culpabilité et image de la femme (2)Apportez le bonheur à votre famille à coup de Brise !

,  par Hervé BERNARD dit RVB

Première version : comment garder son fils à la maison ?
Ce spot débute par l’apparition d’un fils d’une huitaine d’années qui s’adresse à sa mère. Il affirme impératif qu’il n’utilisera pas les toilettes familiales car elles ne sont pas équipées du « purificateur d’air » Brise beaucoup plus discret qu’une bombe. En attendant, il préférera recourir aux toilettes de son ami Paul qui en sont équipées.

Quelles sont les ressorts de cette publicité ?
le « purificateur d’air » se doit être petit, attitude paradoxal, car pour penser à l’employer, il est nécessaire de le voir. Pourtant simultanément, le rendre visible, c’est suggérer qu’il a servi . Ce qui revient à suggérer que cette « bonne odeur » n’est non seulement pas naturel mais dissimule quelque chose.... Et pourtant, ce n’est qu’en l’employant que l’on peut prouver son efficacité d’où le second spot, voir ci-dessous...
- une fois de plus small is beautifull.
- ne pas être équipé d’un tel outillage domestique est une telle honte que ce fils ne peut qu’abandonner une mère aussi indigne. Tellement indigne que celle-ci s’empresse de le suivre dans les toilettes de ce cher Paul pour découvrir cet objet ; toilettes qui sont d’ailleurs une salle de bains.

En résumé, nous sommes donc en présence d’un nouvel outil de séduction des mères à l’égard de leur fils, Mesdames pour que votre fils ne vous abandonne pas recourez à Brise !

Où sont les maris dans cette histoire de mère indigne qui laisse son fils tomber dans les affres de la nature, qui se laisse séduire par son fils ou qui tente de les séduire pour les maintenir au domicile conjugal. Dans ce spot, la nuance n’est pas très claire. « Mères indignent unissez-vous, combattez les mauvaises odeurs ! », voilà un beau slogan.

Autre version, pour séduire ta maman, après ton passage, les toilettes ne doivent jamais sentir mauvais, les odeurs naturelles c’est le Mal. Au fait, les odeurs dans les lieux d’aisance, c’est notamment une question d’alimentation...

Nouvelle autre version : maman, tu es une mauvaise mère parce que tu n’achètes pas à ton fils le dernier désodorisant pour toilettes. Quelle horizon de vie, quelle définition de la bonne mère !

Deuxième version : Le retour des maris
Autrefois, les femmes attendaient leur mari et leur mitonnaient des petits plats et ceux-ci rentraient de leurs journées de labeur et pouvait pénétrer dans le domicile conjugal en humant et clamer joyeusement : « Chéri que m’as-tu (ou nous as-tu) préparer de bon pour ce soir ? » ou dans une autre version peut-être moins ludique, « quel est ce parfum qui règne dans la maison ? »...

Aujourd’hui, quelques minutes avant l’arrivée de son cadre dynamique de mari néanmoins harassé ; la femme aimante se contente d’appuyer quelques secondes sur le diffuseur Brise afin d’imprégner le domicile familial d’une bonne odeur et ainsi répondre au désir de son bien aimé mari, désir de renifler ces fameuses bonnes odeurs.
Malgré cette prévenance attentive, à son retour, ce mari ne résiste pas à la tentation d’insuffler un peu de parfum dans son domicile et tente vainement de déclencher ce diffuseur. Cet homme est tellement maladroit qu’il imagine que cet objet technologique est doté d’un détecteur de présence. Il s’agite donc incongrument devant le fameux « purificateur d’air » sans réussir à le déclencher et pour cause ! Cependant, en femme aimante, attentive et maline, elle comprend la cause de toutes les agitations désordonnées de son époux bien-aimé ; déclenche à nouveau le vaporisateur car elle, elle sait comment faire. En effet, comme nous l’apprend cette maitresse de maison décidément bien habile, celui-ci ne se déclenche automatiquement que toutes les demi-heure. Elle appuie donc négligemment sur le diffuseur et déclenche le bonheur de cet homme tant aimé et tant attendu : une bouffé de Brise, oui ! Un orgasme : non ! Quelle horizon pour la vie de couple : des bouffées de Brise, même pas des bouffées de bonheur !

Question, qu’elles sont de ces deux images, la plus dégradante pour la femme ? Paradoxalement, dirons certains, je pense que c’est la seconde. D’abord, parce qu’elle repose sur l’idéologie de l’instantané, ensuite, elle mésestime le rôle du vivre ensemble. De plus, réduire les compétences d’une personne attentive à son entourage à appuyer sur un bouton, c’est un peu mince. Accessoirement, comme elle dégrade la femme, elle dégrade au passage l’homme. Quant à la première, elle fleure bon l’incestuel...
Ces deux spots publicitaires pour Brise sont, une fois de plus, la démonstration que la culpabilité reste un puissant moteur d’achat. Certains prétendent que l’image de la femme a évoluée dans la publicité et que notre société est devenue insensible aux ressorts de la culpabilité ou encore que l’image de la femme au foyer qui attend son bien-aimé n’est plus de mise. Après de telles images, il nous est difficile de le croire même s’il est vrai qu’appuyer sur un bouton de diffuseur de parfum est autrement plus épanouissant que de mettre un bouquet de fleurs dans la maison ou que de mitonner des bons plats. Au fait, quand verra-t-on une publicité présentant un mari attendant sa femme auprès des fourneaux ?

© Hervé Bernard 2009

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